Ils vont apprendre quoi, les étudiants et étudiantes de CodinGoat ? Le développement informatique – mais pas seulement. La connaissance de soi. Le leadership. Comprendre comment agir au sein d’un collectif.
Oui, bon. Ça fait un peu “Ecole de la Vie”, c’est vrai.
Mais justement, dans la vraie vie, c’est le genre de choses qu’on apprend souvent un peu sur le tas. Par hasard, au grès des opportunités et des circonstances. Ce qui implique aussi que si on n’a pas trop de chance, on ne se retrouvera peut-être jamais en situation d’apprendre tout ça.
Petite étude de cas :
J’ai vécu jusqu’à mes 25 ans dans une absence à moi-même. Forte anxiété sociale, estime de soi faible, des soirées arrosées pour compenser l’un et l’autre. Je ne serais jamais allée chercher un truc qui me fasse grandir – ça m’aurait bien trop fait flipper.
A 25 ans, je suis entrée à 42 sans me projeter dans rien, juste parce que ça avait l’air intellectuellement rigolo.
La suite a été un enchaînement de circonstances, pas un parcours construit.
En début d’année, le staff a annoncé une élection des délégués, et qu’il y aurait la parité dans les délégués. Pour une école avec 90% de mecs, ça a fait jaser sur la représentativité des délégués. Je n’étais pas vraiment populaire – je ne quittais jamais mon poste, je ne socialisais pas beaucoup – mais j’étais dans le top de la promo et donc des camarades m’ont demandé de me présenter pour que ce soit “au moins juste”.
J’ai été élue. J’ai commencé à m’investir à fond – je ne sais pas trop pourquoi, juste que je voyais les problèmes et que j’avais la possibilité de faire quelque chose. J’ai mené une enquête dans l’école pour diagnostiquer les problèmes de communication entre staff et étudiants, fait un rapport, mis en place des AGs pour améliorer ça. J’étais pas moins timide et je ne quittais pas plus mon poste, mais je me suis rendue compte que je pouvais faire bouger quelques trucs.
Quand 1 an plus tard une place s’est ouverte dans l’équipe pédago, j’ai postulé parce que c’était dans la continuité de mon taf de déléguée.
J’ai été prise in-extrémiste – les responsables du pôle pédago étaient assez tièdes, ils considéraient que j’étais trop timide pour faire le lien avec les étudiants. (Ironique, quand on sait que j’ai fini par être écartée du staff parce que je l’ouvrais trop. 😄)
Là, pareil, j’ai constaté des problèmes et j’ai voulu les résoudre coûte que coûte. J’ai bossé sur la gamification et sur plein d’autres trucs pour améliorer l’expérience étudiante.
Rien de tout ça n’a été planifié, je me suis retrouvée dans une situation et un truc a tilté chez moi.
Quand plus tard on a ouvert l’école au Vietnam, ça a été un peu pareil. On était 4 anciens staff de 42 sur le projet avec un CEO académique, mon unique responsabilité étant le curriculum. Les problèmes ont commencé à s’empiler (si vous avez déjà essayé de monter une école en 6 mois dans une autre culture, vous pouvez avoir une idée des galères 😅) et ça me fumait qu’ils ne soient pas résolus au fur et à mesure – j’ai commencé à prendre le lead sur le marketing, le recrutement, la communication… jusqu’à ce que je devienne CEO en interim.
Encore une fois, si on m’avait dit “viens diriger ce projet d’école au Vietnam,” j’aurais passé mon chemin. C’est le fait de me retrouver en situation, d’expérimenter et de découvrir ma place dans le projet qui m’a permis d’y arriver.
Toute cette histoire pour dire : je suis persuadée qu’il y a des choses qui ne se révèlent qu’en situation. On expérimente dans un cadre sécurisant, on se découvre, on construit sa capacité d’agir au fur et à mesure. C’est un dialogue permanent entre ses croyances et l’image de nous que le monde nous renvoie.
On ne se construit pas sans le miroir du collectif, ni sans une prise de position individuelle dans ce collectif.
Et donc, quand on design une expérience d’apprentissage, on a le choix : on peut se contenter des objectifs d’apprentissage métier, ou on peut (en plus) concevoir un cadre qui permet à l’apprenant d’explorer sa capacité d’action.
Je penche pour la seconde option.
Je pense que les expériences pro-activement conçues pour grandir sont rares dans une vie, et que si on a la possibilité d’offrir ça à des étudiants, on doit la saisir.
Il ne s’agit pas d’être directif et de leur dire quoi devenir !
Mais, peut-être, si on fait ça bien, on peut créer les conditions pour que chacun et chacune s’explorent, et les aider à faire sens de leur potentiel d’action.
Pour finir, quand même : les chèvres aiment quand on leur sourit (en anglais).
Si vous croisez une 🐐 aujourd’hui, soyez sympa, faites lui un sourire !
– Laurie